Licenciement pour faute grave d’un salarié en conflit d’intérêts
Le salarié qui signe, au nom de son employeur, des contrats de sous-traitance avec la société de son épouse se trouve en situation de conflit d’intérêts. Cet acte peut constituer un manquement à l’obligation de loyauté justifiant un licenciement pour faute grave.
Contrats de sous-traitance passés avec la société de l’épouse du salarié
Dans cette affaire, un salarié, directeur régional d’une entreprise de BTP, avait été licencié pour faute grave.
Son employeur lui reprochait d’avoir passé cinq contrats de sous-traitance avec la société de son épouse pour plus de 600 000 €, sans l’en avoir informé. Selon lui, le salarié, qui se trouvait en situation de conflit d’intérêts au moment de la conclusion des contrats, avait manqué à son obligation de loyauté.
Connaissance par l’employeur des liens personnels du salarié mais pas de la conclusion des contrats
La cour d’appel a jugé le licenciement sans cause réelle et sérieuse au motif que l’employeur avait connaissance des liens personnels qui unissaient le salarié avec la société sous-traitante, avant même la conclusion des contrats.
En outre, bien qu’elle relève que le salarié était dans une situation « réelle » de conflit d’intérêts, elle considère qu’aucun élément n’établissait que celui-ci avait contrevenu aux intérêts de l’employeur dans le cadre des contrats de sous-traitance.
À ses yeux, le salarié n’avait pas manqué à son obligation de loyauté.
La Cour de cassation censure ce jugement.
Tout d’abord, elle reproche à la cour d’appel de n’avoir pas établi que l’employeur avait été informé de la conclusion par le salarié des contrats de sous-traitance litigieux.
De plus, elle a écarté un peu trop vite le manquement du salarié à son obligation de loyauté qui avait conclu ces contrats en situation de conflit d’intérêts.
L’affaire est donc renvoyée à d’autres juges. Reste à voir s’ils valideront le manquement à l’obligation de loyauté et le licenciement pour faute grave du salarié.
Signalons enfin que, dans une affaire plus ancienne, la Cour de cassation avait invalidé le licenciement d’un salarié qui n’avait pas informé sa hiérarchie de son mariage avec une personne détenant la moitié du capital d’une société affiliée au réseau de son employeur. Ici, la cour d’appel avait relevé l’existence d’un seul « risque » de conflit d’intérêts. Or, pour la Cour de cassation, le seul risque d’un conflit d’intérêts ne peut justifier un licenciement (cass. soc. 21 septembre 2006, n° 05-41155, BC V n° 285).
Cass. soc. 5 février 2020, n° 18-18677 D
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