L’indemnité d’éviction est à la seule charge de l’usufruitier

Aux yeux du locataire d’un bail commercial, c’est l’usufruitier qui assure les fonctions de bailleur. Par conséquent, lui seul est tenu de verser l’indemnité d’éviction lorsque le renouvellement du bail est refusé au locataire.

Le versement d’une indemnité en cas de refus de renouvellement d’un bail commercial

Un immeuble à usage commercial, faisant l’objet d’un démembrement de propriété, est mis en location. Suite au refus du nu-propriétaire et de l’usufruitier de renouveler le bail, les locataires demandent le versement d’une indemnité d’éviction en justice. En effet, lorsque le bailleur refuse de renouveler le bail sans un motif grave et légitime, il est tenu de payer au locataire évincé une indemnité d’éviction égale au préjudice causé par le défaut de renouvellement (c. com. art. L. 145-14, al. 1er).

Les juges saisis de cette affaire constatent que le refus de renouveler le bail ne comporte pas un motif grave et légitime et qu’il a été donné tout à la fois par le nu-propriétaire et l’usufruitier. Ils condamnent in solidum le nu-propriétaire et l’usufruitier à verser 134 000 € d’indemnité d’éviction.

Le nu-propriétaire conteste cette décision devant la Cour de cassation. Il estime que seul l’usufruitier est tenu de verser cette somme.

La qualité de bailleur de l’usufruitier face aux locataires

La Cour de cassation rappelle que si, en application de l’article 595 du code civil, l’usufruitier ne peut pas consentir un bail commercial ou le renouveler sans l’accord du nu-propriétaire (cass. civ., 3e ch., 24 mars 1999, n° 97-16856), il a, en revanche, le pouvoir de mettre fin au bail commercial et de notifier ce refus au locataire sans le concours du nu-propriétaire (cass. civ., 3e ch., 29 janvier 1974, n° 72-13749).

L’usufruitier a seul, poursuit la Cour, la qualité de bailleur et il doit donc en assumer les obligations, y compris celle du versement de l’indemnité d’éviction en cas de refus de renouvellement du bail (cass. civ., 3e ch., 19 décembre 2019, n° 18-26162).

Par conséquent, la Cour de cassation annule la décision des juges, l’usufruitier devant seul être condamné au paiement de l’indemnité d’éviction.

cass. civ., 3e ch., 19 décembre 2019, n° 18-26162