La responsabilité pénale de l’entreprise peut être engagée en cas d’accident mortel d’un salarié
Sur une plateforme pétrolière, un agent de maintenance a été mortellement blessé suite à l’explosion d’une pompe d’extraction de pétrole qu’il tentait de remettre en marche. Or, le système de sécurité de la pompe n’avait pas fonctionné correctement du fait d’un défaut de lubrification imputable à une information insuffisante des salariés sur les règles de maintenance de ce type d’équipement. La société a alors été poursuivie devant le juge pénal.
Pour rappel, en cas d’accident mortel résultant d’un manquement aux règles de sécurité, l’entreprise est déclarée coupable d’homicide involontaire si l’infraction a été commise (c. pén. art. 121-2) :
-par un de ses organes ou représentant,
-qui agissait pour son compte.
Par exemple, il peut s’agir d’un dirigeant de droit ou d’un salarié ayant une délégation de pouvoirs en matière de sécurité (cass. soc. 25 mars 2014, n° 13-80376, B. crim. n° 94).
Dans l’affaire qui nous intéresse, les juges d’appel n’ont pas retenu la responsabilité pénale de l’entreprise même si la faute était bel et bien caractérisée à savoir, un défaut de maintenance habituel et ancien. Selon eux, le dirigeant, qui n’avait pas fait de délégation de pouvoirs, n’avait commis aucune faute personnelle ayant pu causer l’accident puisqu’il :
-travaillait au siège de l’entreprise,
-et n’intervenait pas sur la plateforme pétrolière.
À tort. La Cour de cassation a censuré leur décision.
Elle rappelle que « l’organe ou le représentant » auteur de l’infraction ayant causé l’accident mortel doit impérativement être identifié pour mettre en cause la responsabilité pénale de l’entreprise (cass. crim. 6 mai 2014, n° 13-81406, B. crim. n° 125).
La Cour de cassation rappelle aussi que c’est au dirigeant de veiller lui-même à la « stricte et constante » application des dispositions du code travail destinées à assurer la sécurité des travailleurs ou de déléguer ses pouvoirs en la matière (cass. crim. 6 septembre 2016, n° 15-84186 D).
En l’espèce, les juges d’appel auraient dû vérifier si le défaut de maintenance à l’origine de l’accident mortel ne révélait pas un manquement du dirigeant à son obligation personnelle de sécurité, dans la mesure où il n’avait pas fait de délégation de pouvoirs. Ils n’auraient pas dû écarter la faute du dirigeant et donc, la responsabilité pénale de l’entreprise. L’affaire devra de nouveau être jugée.
En conclusion, le chef d’entreprise risque d’être identifié comme le représentant de la personne morale auteur de l’infraction à l’origine de l’accident mortel si, comme en l’espèce, il n’a pas délégué ses pouvoirs. Et ce, du fait de sa responsabilité de principe en matière de sécurité. L’employeur a donc tout intérêt à faire une telle délégation. Il y est même tenu quand la taille ou l’organisation de l’entreprise ne lui permettent pas de veiller lui-même à l’application des règles de sécurité (cass. crim. 1er octobre 1991, n° 90-85024 D).
Cass. crim. 31 octobre 2017, n° 16-83683 FSPB
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