Une déclaration de créance effectuée par un salarié sans pouvoir valable peut être régularisée
Un salarié peut déclarer la créance de son employeur à un liquidateur judiciaire sans détenir une délégation de pouvoir en bonne et due forme. En effet, l’employeur pourra ratifier par la suite cette déclaration.
Un contentieux mené par un liquidateur judiciaire
Une société est mise en liquidation judiciaire en laissant son compte bancaire débiteur de 4 700 €. La banque effectue alors sa déclaration de créance par l’intermédiaire d’un de ses salariés.
Cette créance est contestée par le liquidateur pour le motif suivant : lorsque le salarié a effectué la déclaration, la banque avait été absorbée par une entité plus importante. Or, le salarié ne détenait pas de délégation de pouvoir du dirigeant de cette entité. Sa délégation avait été signée par le dirigeant de la banque absorbée. Pour le liquidateur, la délégation de pouvoirs et, par voie de conséquence, la déclaration de créance n’ont aucune valeur.
Naturellement, la banque réfute cette contestation. Il s’ensuit un procès que le liquidateur porte jusque devant la Cour de cassation.
La Cour de cassation donne tort au liquidateur
La Cour de cassation rappelle qu’une déclaration des créances peut être faite par le créancier ou par tout préposé ou mandataire de son choix. En outre, le créancier peut ratifier la déclaration faite en son nom jusqu’à ce que le juge statue sur l’admission de la créance (c. com. art. L. 622-24, al. 2).
La Cour constate que, au cours du procès, la nouvelle entité bancaire a demandé l’admission de sa créance, ce dont il résulte qu’elle a nécessairement ratifié la déclaration de créance faite en son nom. Par conséquent, la Cour estime infondée la contestation du liquidateur.
Enseignement pratique pour tout créancier
Des contestations trop systématiques de la part des liquidateurs. – Il fut un temps où bon nombre de liquidateurs cherchaient de façon assez systématique à contester les déclarations de créances effectuées par les salariés. Selon les cas et entre autres exemples, ils se plaignaient de ce que :
– la délégation de pouvoir n’avait pas été jointe à la déclaration ;
– le salarié bénéficiaire de la délégation n’était pas celui qui avait fait la déclaration ;
– la délégation n’était pas précise ;
– elle était postérieure à la déclaration ;
– …
Ces contestations incessantes avaient pour but d’écarter définitivement certains créanciers.
L’important est de déclarer la créance dans le délai légal. – L’ordonnance 2014-326 du 12 mars 2014 a entendu mettre fin aux contentieux menés par les liquidateurs et a ajouté, dans l’article L. 622-24 du code de commerce, la précision selon laquelle le créancier pouvait toujours ratifier la déclaration faite en son nom dès lors que la justice n’avait pas encore rejeté définitivement sa créance.
Cette règle est parfaitement illustrée dans l’affaire relatée ci-dessus.
En pratique, l’essentiel, pour un créancier, reste que sa déclaration de créance soit effectuée dans le délai de 2 mois à compter de la publication au BODACC du jugement d’ouverture de la procédure collective. À défaut, elle sera inopposable au liquidateur (c. com. art. L. 622-26). Si, par hasard, le salarié qui déclare la créance ne détient pas une délégation de pouvoir en bonne et due forme, ce n’est pas grave ; il restera possible de régulariser par la suite.
Cass. com. 29 septembre 2021, n° n° 20-12292
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