La banque a un devoir de mise en garde vis-à-vis du gérant qui se porte caution

Lorsqu’il n’a pas une connaissance particulière des techniques financières, le gérant qui se porte caution doit être informé par la banque du risque d’endettement qu’il prend.

Prêt bancaire accordé à une société en échange d’un engagement de caution de son gérant

Pour garantir le remboursement d’un emprunt bancaire accordé à sa société, un gérant se porte caution.

Par la suite, la société est mise en liquidation judiciaire et le gérant est poursuivi par la banque.

Le gérant fait alors valoir que, avant la signature de l’acte de caution, la banque aurait dû le mettre en garde contre les conséquences de son engagement, ce qu’elle n’a pas fait. Il réclame des dommages et intérêts à la banque.

La banque devait-elle mettre en garde le gérant contre les risques de son cautionnement ?

La banque rappelle que seule une caution « non avertie » doit être mise en garde. Or, selon la banque, un gérant est nécessairement une caution «avertie». La banque estime qu’elle n’avait donc aucune obligation à l’égard du gérant.

L’argument de la banque est rejeté par les juges : la gérance d’une société ne suffit pas à conférer la qualité de caution «avertie» dès lors que le gérant n’a pas une connaissance particulière des techniques financières et bancaires.

Toutefois, ajoutent les juges, la banque ne détenait pas d’informations particulières sur la situation de la société, que le gérant aurait ignorées, permettant de faire craindre un risque d’endettement excessif sur lequel il convenait de le mettre en garde.

De plus, le crédit consenti à la société n’était ni ruineux ni inadapté.

En outre, l’engagement de caution n’était pas disproportionné à ses revenus et patrimoine.

Les juges concluent que la banque n’avait donc pas à mettre en garde le gérant par rapport à un risque d’endettement excessif qui n’était pas avéré.

Réponse de la Cour de cassation

La décision des juges est censurée par la Cour de cassation :

– d’une part, la banque est tenue, à l’égard d’un caution non avertie (ce qu’est bien ce gérant), d’un devoir de mise en garde à raison de ses capacités financières et du risque de l’endettement né de l’octroi du prêt ;

– d’autre part, cette obligation n’est pas limitée au caractère disproportionné de l’engagement du gérant au regard de ses biens et revenus.

Par le passé, la Cour de cassation avait déjà admis que le défaut de mise en garde d’une caution non avertie pouvait être reproché à la banque même si l’engagement de caution n’était pas disproportionné aux revenus de la caution (cass. com. 15 novembre 2017, n° 16-16790). Elle reprend ici cette même position.

Cass. com. 1er juillet 2020, n° 18-24435