Covid-19 : nouvelle mise à jour des questions/réponses sur le télétravail
Le 3 novembre 2020, le ministère du Travail a procédé à une nouvelle mise à jour de ses questions/réponses relatives au télétravail. Il y rappelle les règles applicables pour mettre en place le télétravail, l’impossibilité pour le salarié d’imposer le télétravail à son employeur et les risques de sanction pour les entreprises qui refusent le télétravail.
Le document questions / réponses comme un guide pratique
Le télétravail, présenté comme un des leviers permettant de lutter contre la propagation du coronavirus, a fait l’objet, au printemps 2020, d’un document questions/réponses du ministère du Travail, qui a ensuite connu plusieurs mises à jour. La dernière date du 3 novembre 2020.
Dans les circonstances exceptionnelles actuelles, liées à la menace de l’épidémie, le protocole national pour assurer la santé et la sécurité des salariés en entreprise face à l’épidémie de Covid-19 indique que le télétravail doit être la règle pour l’ensemble des activités qui le permettent.
Rappelons que le document questions/réponses n’a pas la valeur d’une loi, d’un décret ni même celle d’une circulaire. Ses précisions constituent des aides pratiques pour les employeurs et les salariés, qui doivent néanmoins, à notre sens, garder à l’esprit que les juges pourront toujours adopter une autre interprétation à l’occasion d’un contentieux.
Les nouvelles précisions apportées
Consultation a posteriori du CSE sur la mise en place du télétravail – Dans les entreprises d’au moins 50 salariés, le document questions/réponses rappelle que l’employeur doit, en principe, consulter le comité social et économique (CSE) lorsqu’il décide que les salariés doivent être placés en télétravail puisqu’il s’agit d’une question intéressant l’organisation, la gestion et la marche générale de l’entreprise (c. trav. art. L. 2312-8). Le CSE a ensuite minimum un mois (cela peut être plus s’il fait appel à un expert) pour se prononcer (c. trav. art. R. 2312-6).
Cependant, face à l’urgence de la crise sanitaire et pour répondre rapidement à la mesure de confinement décidée par le gouvernement, le ministère du Travail indique que l’employeur pourra d’abord se fonder sur le texte du code du travail qui relève que face à une menace d’épidémie, la mise en œuvre du télétravail peut constituer un simple aménagement du poste de travail pour permettre la continuité de l’activité de l’entreprise et garantir la protection des salariés (c. trav. art. L. 1222-11).
Dans ces circonstances, le CSE peut donc être uniquement consulté a posteriori, après la mise en œuvre de la décision de l’employeur de recourir au télétravail. Pour autant, le document questions / réponses relève que cette consultation devra se faire « dès que possible » et, qu’en tout état de cause, l’employeur devra « sans délai » informer le CSE de sa décision.
Pas de possibilité pour le salarié d’imposer à l’employeur le télétravail – Le document questions/réponses rappelle que c’est à l’employeur que revient la charge de mettre en place le télétravail dans l’entreprise, le cas échéant dans le cadre de l’accord collectif ou de la charte existant dans l’entreprise à ce sujet. En tout état de cause, comme le prévoit le protocole national, l’employeur est invité à le faire dans le cadre du dialogue social de proximité.
À notre sens, le salarié ne peut donc pas, à proprement parler, imposer l’usage du télétravail à son employeur.
Pour autant, le ministère du Travail souligne que lorsqu’un accord ou une charte sur le télétravail existe dans l’entreprise, le salarié peut formuler une demande de télétravail et l’employeur qui la refuse doit alors motiver sa décision (c. trav. art. L.1222-9). Pour ce faire, le document questions/réponses précise que l’employeur doit ainsi démontrer que la présence du salarié sur le lieu de travail est indispensable au fonctionnement de l’entreprise et à l’exercice de l’activité dudit salarié.
Les risques de sanction pour les entreprises refusant le télétravail – Étant donné le contexte exceptionnel que nous connaissons, et le fait que le télétravail fait partie des mesures permettant de limiter la contamination au covid-19 parmi les salariés, le document questions / réponses relève qu’un employeur qui refuserait de le mettre en place alors que son activité s’y prête pourrait engager sa responsabilité au titre de son obligation de protéger la santé et d’assurer la sécurité de ses salariés (cass. soc. 25 novembre 2015, n° 14-24444, BC V n° 234 ; c. trav. art. L. 4121-1 et L. 4121-2).
Cette responsabilité, si elle était engagée, pourrait conduire l’employeur à verser des dommages et intérêts au salarié qui l’assigne en justice.
Rappelons sur ce sujet que le protocole national en entreprise actualisé le 29 octobre 2020 a généralisé le recours au télétravail et prévoit qu’il doit être porté à 100 % pour les salariés qui peuvent effectuer l’ensemble de leurs tâches à distance.
Si le protocole n’est pas juridiquement contraignant, il constitue un ensemble de recommandations pour la déclinaison matérielle de l’obligation de sécurité de l’employeur dans le cadre de l’épidémie de covid-19 (CE 19 octobre 2020, n° 444809). Le non-respect par l’employeur du protocole et de ses recommandations en matière de télétravail pourrait donc avoir une incidence sur l’appréciation du manquement ou non à son obligation de sécurité.
Enfin, même si le ministère du Travail ne l’évoque pas, soulignons, qu’il existe aussi un éventuel risque de responsabilité pénale de l’employeur pour mise en danger de la vie d’autrui (c. pén. art. 223-1) et homicide ou blessures involontaires (c. pén. art. 221-6 et 222-19).
De manière plus large que la seule responsabilité pour défaut de mise en place du télétravail évoqué ici, rappelons que le ministère du Travail a aussi édité un document relatif aux obligations générales de l’employeur et à sa responsabilité en matière de sécurité et de santé des travailleurs, mis à jour le 15 octobre. Il y indique notamment que l’employeur qui ne peut mettre en télétravail ses salariés mais qui met à leur disposition des moyens de protection tels que savons, gel hydroalcoolique et tout autre moyen recommandé par les pouvoirs publics, les informe régulièrement et de façon actualisée sur la prévention des risques de contamination en adaptant leur formation à la situation de l’entreprise et à la nature des postes occupés ne devrait pas, sous réserve de l’appréciation souveraine des juges, encourir de sanction pénale (https://travail-emploi.gouv.fr/le-ministere-en-action/coronavirus-covid-19/proteger-les-travailleurs-les-emplois-les-savoir-faire-et-les-competences/proteger-les-travailleurs-covid-19/article/securite-et-sante-des-travailleurs-les-obligations-generales-de-l-employeur-et).
Ministère du Travail, document questions/réponses « Télétravail », mis à jour le 3 novembre 2020
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