Comment mener une enquête en cas de suspicion de harcèlement moral ?
L’employeur qui n’a pas déclenché une enquête, à la suite d’une dénonciation de harcèlement moral, court le risque de se voir reprocher un manquement à son obligation de sécurité. Mais doit-il entendre tous les salariés potentiellement harcelés pour que son enquête soit valable ?
Sanctionner l’auteur de faits de harcèlement
En matière de harcèlement moral, l’employeur est astreint à une obligation de prévention (c. trav. art. L. 1152-4). Mais s’il arrive que de tels agissements de harcèlement interviennent dans l’entreprise, il doit y mettre un terme (c. trav. art. L. 4121-1 et L. 4121-2).
Il pourra ainsi s’exonérer de sa responsabilité vis-à-vis d’un harcèlement moral qui se serait produit dans l’entreprise, à la double condition (cass. soc. 1er juin 2016, n° 14-19702, BC V n° 123) :
-d’avoir pris toutes les mesures immédiates propres à faire cesser le harcèlement moral et avoir réussi à le faire effectivement cesser ;
-et d’avoir pris, en amont des faits en cause, toutes les mesures de prévention nécessaires pour empêcher le harcèlement et notamment avoir préalablement mis en œuvre des actions d’information et de formation propres à prévenir la survenance de faits de harcèlement moral.
Dans l’affaire tranchée par la Cour de cassation le 22 janvier 2020, un employeur avait licencié pour faute grave un salarié occupant le poste de directeur du développement et du patrimoine, au motif que celui-ci avait harcelé moralement tous ses collaborateurs (répartis dans deux services).
Mener une enquête en cas de dénonciation de harcèlement moral, mais laquelle ?
Après la dénonciation d’un harcèlement moral au sein de son entreprise, un employeur ne doit pas rester inactif, il lui faut diligenter une enquête interne et contradictoire qui lui permettra de sanctionner, ou de disculper, le salarié accusé de harcèlement (cass. soc. 27 novembre 2019, n° 18-10551 FPPB). Il doit ainsi entendre les arguments du salarié qui se prétend victime de harcèlement et ceux de celui qui en est accusé.
Ici, l’employeur avait effectivement mené une enquête. Il avait ensuite motivé la lettre de licenciement motivée par les agissements de harcèlement moral du salarié envers tous ses collaborateurs alors que seule la moitié de ces collaborateurs, appartenant, en outre, presque tous à un seul des deux services dirigés par le salarié, avait été entendue.
Cette enquête pouvait-elle être considérée comme un élément de preuve ?
Oui pour la Cour de cassation. Si une enquête doit être exhaustive et impartiale pour être valable, cela ne signifie pas qu’elle doit être menée auprès de tous les collaborateurs du salarié auquel des agissements de harcèlement moral sont reprochés.
Cass. soc. 8 janvier 2020, n° 18-20151 D
Les commentaires sont fermés.